jeudi, décembre 04, 2008

NOTES SUR L'AMÉRIQUE EN TRANSITION



Il semble que l’avènement du 21ème siècle a apporté un vent de changement sur le monde. À cet égard, on ne peut pas dire que l’Amérique soit en reste quoique le changement soit loin d’être uniformément réparti sur le continent. C’est pourquoi, en vue d’un bilan, il y a lieu de considérer, d’une part, l’Amérique centrale et les Antilles, d’autre part, l’Amérique du Sud et l’Amérique du nord.

L’Amérique centrale et les Antilles

Des trois Amérique, l’Amérique centrale et les Antilles forment l’espace géographique le plus restreint en termes de population et de marché ( aux alentours de 1% de la population et du PIB mondial), le moins développé et peut-être le moins perméable au changement. En excluant les petites Antilles, des douze états et territoires qui forment l’essentiel de cette région, Cuba et Haïti méritent une mention spéciale. Le premier, que dirigeaient Fidel Castro depuis près de 50 ans et maintenant son frère Raul Castro depuis 2007, parce qu’il plie depuis le début du régime sous le fardeau de l’embargo des Etats-Unis et, le deuxième, sous la gouverne de René Préval ( président depuis 2006) et de Michelle Pierre-Louis, (première ministre en 2008), parce qu’il croupit dans la misère que lui a valu un demi-siècle de dictature, de corruption et d’incompétence.

L’Amérique du Sud

C’est en Amérique du Sud que le vent du changement semble avoir commencé à souffler, particulièrement en direction des Etats-Unis. Jusqu’alors, ces derniers considéraient l’Amérique du Sud comme leur arrière-cour, y faisant et défaisant les gouvernements. En mettant en question le néolibéralisme comme mode de fonctionnement de l’économie et, plus généralement, l’hégémonie étatsunienne tant sur le plan idéologique que politique ( voir Pacte andin 1969, Mercosur 1994, Alba 2004, Projet de gazoduc Sud-américain 2005, Telesur 2005, Banco del Sur 2007,Unasur 2008, etc.) l’Amérique du Sud a choisi de favoriser l’intégration de la portion latine de l’hémisphère et d’instaurer en même temps, une cassure historique sur le plan des relations internationales. D’où cette interrogation : " L’Amérique latine : nouvel ordre régional ou mondial? in cramoel.blogspot.com''.
Il importe, par conséquent, de voir les principaux centres de changement dans cette partie du continent, mis à part les états que sont la Colombie d’Alvaro d’Uribe et le Pérou d’Alan Garcia encore dans le giron du néolibéralisme, sans oublier les territoires du Surinam et de la Guyane, récemment indépendant pour le premier et possession française pour le second.
À noter que le Mercosur comprend les états suivants : Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay, Venezuela. On peut dire donc que la ligne de démarcation des états du sous-continent passe entre le plus grand nombre qui favorisent l’intégration latine et ceux qui sont liés aux Etats-Unis par des rapports de libre-échange comme le Chili, le Pérou et la Colombie encore que ces derniers soient, avec la Bolivie et l’Équateur, des membres associés au Mercosur.

Venezuela

: Ce pays est l’un des premiers, avec le Brésil, à avoir, de façon manifeste, initié le changement dans cette partie du continent. Cela s’est fait avec l’arrivée de Chavez en 1999 à la tête de l’état et, surtout, après le coup d’État manqué contre son gouvernement. C’est à cette époque que remonte sa déclaration de guerre contre l’impérialisme des États-Unis et l’intervention multiforme de ces derniers dans le pays. Cela s’est fait également par l’instauration d’une orientation résolument de gauche connue sous le nom de " révolution bolivarienne " en axant le Venezuela sur un nouveau modèle de développement économique et social et en se donnant en même temps un rôle actif au niveau régional sur le plan idéologique. Quoique le président soit très controversé sur le plan de ses décisions économiques, on ne peut nier que le pays soit comptable de beaucoup de mesures sociales propres à favoriser les plus démunis.

Argentine

: De la crise économique qui a prévalu dans ce pays au détour du siècle à aujourd’hui avec l’élection en 2007 de Cristina Fernandez du Parti justicialiste à la présidence de son pays, la seconde femme, à ce titre, en Amérique du Sud , il y a un vent de changement en Argentine. Sans doute, les éléments n’en sont pas les mêmes qu’ailleurs, dans les autres états du sous-continent qui se sont orientés résolument vers la gauche…Mais dans la mesure où ce pays est partie prenante du mouvement d’ensemble dans la région, particulièrement en ce qui concerne la mise en question du rapport des centres hégémoniques avec la périphérie, un peu de ces changements est à mettre à son crédit.

Equateur

:Comme pour le président Vasquez d’Uruguay, le président Rafael Correa d’Equateur, élu en 2006, est le produit d’une alliance de différents partis de gauche, en l’occurrence, le parti Alianza Pais. Économiste de formation identifié à la gauche, il a pris ses distances avec le projet de libre-échange avec les États-Unis de même qu’avec la dollarisation de l’économie opérée en l’an 2000. Sa gestion économique l’a mis en confrontation avec le FMI et la Banque mondiale desquels il refusait les diktats.

Brésil :

L’élection de Luis Ignacio Da Silva, ouvrier syndicaliste comme président en 2002 malgré les pesanteurs sociologiques et l’étanchéité des classes sociales est profondément symbolique des changements de mentalité dans cet immense pays de 140 millions d’habitants. De plus, cette élection a été porteuse de changement à beaucoup d’égards. D’abord par les différentes politiques pour l’avancement des déshérités, mais aussi par les changements dans les relations internationales notamment vis-à-vis des Etats-Unis. À plusieurs reprises, si les conférences internationales ( OMC, Sommet des Amériques etc.) ont connu l’échec, c’est, entre autres, à cause de la position du président du Brésil qui réclamait des conditions égales à celles dont bénéficiaient les États-Unis. Et le signe que son élection n’était pas un accident, c’est qu’il a été réélu en 2006.

Chili

: Le Chili a une situation paradoxale. D’un côté, il s’agit d’un état qui, six ans après l’effacement d’Augusto Pinochet de la scène politique au Chili et seize ans après sa chute comme président, présente l’aspect du changement avec l’élection en 2006 d’une femme de gauche à la tête du pays en la personne de Michelle Bachelet. Dans un pays axé sur le machisme et centré profondément sur les valeurs chrétiennes sinon catholiques, elle est un libre penseur qui ne s’est jamais marié et dont les enfants sont de deux pères différents. Néanmoins, la présidente a beau être de gauche, les institutions du pays demeurent engluées dans des pratiques néolibérales que n’arrivent pas à vraiment secouer les politiques sociales mises de l’avant.

Bolivie

: Dans ce pays, le changement a pris la forme de l’élection à la présidence de la Bolivie en 2005 d’un premier descendant autochtone d’origine Aymara. C’est un militant de gauche qui a été d’abord ouvrier syndicaliste. Son programme consiste notamment dans la réforme agraire, la redistribution des ressources du pays au bénéfice des plus pauvres, particulièrement les autochtones et la limitation de la mainmise étrangère sur ces ressources. Dès sa prise du pouvoir, il s’est attelé à la tâche de la redistribution de la richesse du pays en mettant à contribution les provinces riches, au bénéfice des plus pauvres, dans un cadre administratif de péréquation.

Uruguay

: Tabaré Vasquez est le président de ce pays. Il a été élu en mars 2005. Il est le chef de Frente Amplio, un parti formé par une coalition des partis de gauche et dont l’un des points importants du programme de gouvernement consiste à rendre possible une plus grande justice sociale. Les principaux éléments d’action du gouvernement s’ordonnent autour du projet de développement de la société uruguayenne. À cet égard, plusieurs mesures sociales ont été mises de l’avant comme des programmes contre le tabagisme, l’avortement etc. à commencer par un programme d’assistance sociale pour les démunis.

Paraguay

: Avec l’élection dans ce pays du progressiste Fernando Lugo (ci-devant membre de l’Alliance patriotique pour le changement) à la présidence de la république en août 2008, le Paraguay a tourné le dos à une longue ère de dictature, d’immobilisme et de conservatisme. Les principaux éléments du programme de gouvernement sont la réforme agraire, l’éradication de la corruption et l’autonomie économique.
L’Amérique du Nord

Etats-Unis :

les Etats-Unis d’Amérique forment un pays tout à fait singulier où le pire côtoie le meilleur à tous les niveaux de la société.
C’est le pays du gouvernement Bush qui pour s’accaparer des sources pétrolifères irakiennes n’a pas hésité à envahir l’Irak au prix de plus d’un million de morts sous le faux prétexte que ce pays dispose des armes de destruction massive au grand dam de l’ONU.
Cela n’empêche pas qu’au même moment ont lieu aux Etats-Unis des changements positifs de grande valeur symbolique sur le plan de la situation raciale. C’est le cas de la nomination de Colin Powel suivie de celle de Condolezza Rice, deux afro-américains d’origine, au poste de Secrétaire d’état aux Affaires étrangères.
Mais ce qui surclasse tous les symboles du genre, c’est l’élection de Barak Obama, un autre afro-américain à la présidence des Etats-Unis, 44 ans après la fin de la ségrégation des noirs dans ce pays.

Canada

: Sur le plan du changement des mentalités, le Canada n’est pas en reste pour avoir nommé en 2005 Michaëlle Jean, une femme noire d’origine haïtienne au poste de Gouverneure générale du Canada. On peut déplorer, néanmoins, qu’au chapitre des autochtones, le gouvernement Harper ait refusé de signer l’accord de l’ONU concernant La Déclaration des Nations-Unies sur les droits des peuples autochtones soumise en 2007.

Mexique

: en matière d’évolution des mentalités, le Mexique peut difficilement réaliser avec les Etats-Unis. Il n’empêche que l’avènement du 21ème siècle consacre un changement important dans la gouvernance du Mexique. Pour la première fois en 70 ans, le Parti révolutionnaire institutionnel(PRI) a mordu la poussière aux élections au bénéfice du Part national révolutionnaire(PAN) en l’an 2000, créant les conditions d’une nouvelle ère dans le fonctionnement de la démocratie et le développement de la société.
Le 20 nov 2008
Marc L.Laroche